ONU et la Crise des Otages à Gaza : Situation Alarmante
Cette analyse approfondie explore la crise humanitaire critique à Gaza, les défis liés aux otages israéliens, et l'appel de l'ONU à une action humanitaire efficace face à la tragédie en cours.

Cette analyse approfondie explore la crise humanitaire critique à Gaza, les défis liés aux otages israéliens, et l'appel de l'ONU à une action humanitaire efficace face à la tragédie en cours.
EDITION FRANCAISE Depuis le 7 octobre dernier, suite aux crimes commis par le Hamas et à l’incertitude quant au sort des otages israéliens détenus à Gaza, l’armée israélienne continue son offensive destructrice dans la bande de Gaza qui aurait tué, selon le ministère de la Santé du Hamas cité par l’AFP, plus de 22’000 personnes et blessé plus de 57’000 personnes, en grande partie des femmes, des adolescents et environ 8’000 enfants. La population de la bande de Gaza, petit territoire de 41 kilomètres de long et de 6 à 12 km de large pour une superficie de 365 km² bouclé par l’armée israélienne, étant estimée à quelque 2,2 millions d’habitants, une personne sur cent serait désormais morte suite aux opérations militaires de l’armée israélienne qui combat le Hamas. Une situation jugée « apocalyptique » par Pascal Hundt, Chargé de la gestion des crises au Comité international de la Croix-Rouge (CICR).
Outre les bombardements sur la bande de Gaza, des opérations israéliennes ont également eu lieu dans divers secteurs de la Cisjordanie occupée, faisant de nombreux morts, selon l’agence palestinienne Wafa. Par ailleurs, la destruction d’un bâtiment par une frappe israélienne à Beyrouth, capitale du Liban, tuant Saleh al-Arouri, chef adjoint de la branche politique du Hamas, et cinq autres personnes risque d’embraser cette région sous haute tension.
Le nombre de victime palestiniennes ne cessant d’augmenter, le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme Volker Türk s’est dit « très troublé par les déclarations de hauts responsables israéliens sur les projets de transfert de civils de la bande de Gaza vers des pays tiers ». Dans un message publié sur le réseau social X, il a écrit que « 85% des habitants de Gaza sont déjà des déplacés internes ». Ajoutant : « ils ont le droit de rentrer chez eux ». Ses mots font suite à une déclaration du ministre israélien de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, qui a appelé à un retour de colons juifs à Gaza après la guerre et « encouragé » la population palestinienne à émigrer.
Autres chiffres avancés : environ 1 200 Israéliens auraient été tués dans l’attaque du Hamas en Israël. Et selon les familles des 136 otages israéliens sous le choc, enlevés le 7 octobre, plus de 40 femmes et enfants sont introuvables.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a indiqué que « la faim et le désespoir » s’aggravent à Gaza. Manque d’eau, de produits de première nécessité, menace de propagation de maladie infectieuses, risque de famine, enfants traumatisés, nul endroit sécurisé où se protéger. Selon l’ONU, citée par la BBC, près de 50’000 habitations ont été détruites sur l’ensemble du territoire et 80% de la population a été déplacée. Pour le Bureau central des statistiques palestiniennes, l’année 2023 a été « la plus meurtrière » depuis la Nakba (la catastrophe en arabe), en référence à la guerre israélo-arabe qui avait éclaté en 1948 après la création de l’Etat d’Israël et poussé environ 760’000 Palestiniens à l’exode.
Les plus hautes instances onusiennes alertent depuis des mois sur la situation catastrophique dans la bande de Gaza. Le Commissaire général de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), Philippe Lazzarini, en poste depuis mars 2020, a résumé sur le réseau X le désarroi de la communauté humanitaire face à l’indifférence de la communauté politique internationale. « Anéanti. Confirmation que plus de 100 collègues de l’UNRWA ont été tués en un mois. Parents, enseignants, infirmières, médecins, personnel de soutien. L’@UNRWA est en deuil, les Palestiniens sont en deuil, les Israéliens sont en deuil. Pour mettre fin à cette tragédie, il faut un cessez-le-feu humanitaire maintenant ».
Le 24 octobre dernier, lors d’une réunion du Conseil de sécurité, le Secrétaire général de l’ONU António Guterres avait réitéré son appel à un cessez-le-feu humanitaire et martelé qu’« aucune partie à un conflit armé ne peut se considérer au-dessus du droit international », peut-on lire sur le site ONU Info.
« Même la guerre a des règles », exigeant de toutes les parties qu’elles respectent leurs obligations en vertu du droit humanitaire international, qu’elles veillent constamment à épargner les civils dans la conduite des opérations militaires, qu’elles respectent et protègent les hôpitaux et qu’elles respectent l’inviolabilité des installations de l’ONU, où s’abritent aujourd’hui plus de 600 000 Palestiniens.
Se réjouissant qu’une partie de l’aide humanitaire parvienne enfin à Gaza, António Guterres estime néanmoins qu’il ne s’agit que d’ « une goutte d’eau dans un océan de besoins », et que les réserves de carburant de l’ONU à Gaza seront épuisées dans quelques jours, ce qui pourrait entraîner une autre catastrophe.
Pour le Secrétaire général de l’ONU rien ne justifie l’assassinat, les blessures et l’enlèvement délibérés de civils, ni le lancement de roquettes contre des cibles civiles. Quant aux otages retenus par le Hamas, ceux-ci doivent être traités avec humanité, libérés immédiatement et sans conditions.
Et le plus haut fonctionnaire onusien d’ajouter qu’il est important de reconnaître que les attaques du Hamas s’étaient produites dans le contexte « d’une occupation étouffante » de 56 ans. « Le peuple palestinien a vu ses terres régulièrement dévorées par les colonies et en proie à la violence, son économie étouffée, ses habitants déplacés et leurs maisons démolies. Leurs espoirs d’une solution politique à leur situation se sont évanouis. Mais les griefs du peuple palestinien ne peuvent justifier les attaques effroyables du Hamas. Et ces attaques effroyables ne peuvent justifier la punition collective du peuple palestinien ».
Philippe Lazzarini, le Commissaire général de l’UNRWA (Photo: UN)
Dans un entretien avec Global Geneva l’été dernier, Philippe Lazzarini, le Commissaire général de l’UNRWA, avait confié : « Le statu quo et le manque d’horizon politique sont devenus la principale menace existentielle pour l’UNRWA », expliquant que la crise financière dans laquelle se débat l’organisation qu’il dirige « a débuté il y a une dizaine d’année, au moment où le processus de paix a commencé à stagner et où le conflit israélo-palestinien n’a plus été une priorité », évoquant également une nouvelle dynamique régionale et, au niveau mondial, de plus en plus de compétition face aux crises. Sans oublier une certaine indifférence pour ne pas dire fatigue. « L’on n’a pas réussi à résoudre ce conflit pendant 75 ans et le centre d’intérêt n’a plus été celui qu’il aurait dû être ».
S’il n’avait pas prévu l’attaque du Hamas en Israël le 7 octobre dernier, Philippe Lazzarini avait anticipé que les ressources d’UNRWA ayant fortement stagné, la patience des Palestiniennes et Palestiniens était à bout face à l’indifférence de la communauté internationale, chefs d’États occidentaux et arabes compris. « La région ayant été touchée par de multiples crises, les besoins ont augmenté, ainsi que les attentes. Les coûts se sont envolés avec l’impact de la crise en Ukraine et du Covid, ainsi qu’avec l’inflation mondiale. « Nous ne sommes pas en mesure de répondre à l’augmentation des besoins et des attentes, qui ont renforcé le sentiment d’abandon des Palestiniens de la part de la communauté internationale », avait souligné Philippe Lazzarini, le plus haut diplomate suisse dans la sphère onusienne.
L’année 2024 marque le 75e anniversaire de l’UNRWA, créée en 1949, après la guerre israélo-arabe de 1947-1949, conflit issu du partage de la Palestine en 1947 puis de la fondation de l’État d’Israël en 1948. Pour Philippe Lazzarini « il n’y a pas grand-chose à célébrer de ces 75 ans de non résolution d’un conflit qui perdure. Les choses vont de mal en pis et la seule manière d’y répondre est d’avoir une véritable discussion politique sur ce que l’engagement de la communauté internationale est et devrait continuer à être en l’absence d’une réponse politique vis-à-vis des réfugiés palestiniens ».
Les dirigeants politiques israéliens, occidentaux et arabes pensaient-ils que le statu quo, une certaine fatigue et indifférence internationale par rapport à la question israélo-palestinienne et l’omerta y compris des pays démocratiques face à l’occupation israélienne des Territoires palestiniens occupés allait durer indéfiniment ? « L’intérêt pour une solution de la question israélo-palestinienne n’est plus celui d’il y a dix ans. Le temps n’est pas en notre faveur. D’où la nécessité d’avoir une discussion en urgence avec les pays hôtes et les pays donateurs. Les pays hôtes avaient une perception sous un angle politique et les donateurs sous un angle technique et budgétaire. Ceux qui étaient en charge des budgets n’étaient pas forcément en charge de l’engagement politique du pays qu’ils représentaient », d’après le Commissaire général de l’UNRWA.
L’offensive menée par Israël à Gaza depuis le 7 octobre 2023, suite aux attaques meurtrières du Hamas en Israël, a rappelé aux dirigeants du monde qu’il est urgent de contribuer à trouver une solution politique au conflit israélo-palestinien. Et d’obtenir un cessez-le-feu qui permette qu’une aide humanitaire importante et non au compte-goutte parvienne aux civils palestiniens afin qu’ils puissent survivre et pour que des négociations aident à la libération des otages israéliens.
Les proches des otages retenus dans la bande de Gaza maintiennent d’ailleurs la pression sur le gouvernement israélien en manifestant et en scandant « Ramenez-les à la maison! ».
La réponse du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu ? Pas de trêve de Noël ni de Nouvel An, mais l’annonce le 25 décembre dernier d’une « intensification des combats ». À La Haye, le 29 décembre 2023, l’Afrique du Sud a déposé devant la Cour internationale de Justice (CIJ), organe judiciaire principal de l’Organisation des Nations Unies, une requête introductive d’instance contre l’État d’Israël au sujet de supposés manquements par cet État aux obligations qui lui incombent au titre de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (la « convention contre le génocide ») en ce qui concerne les Palestiniens dans la bande de Gaza.
Dans un rapport du 3 janvier 2024, la Presse Emblème Campagne (PEC) a annoncé qu’avec 140 journalistes tués, l’année 2023 a été la plus meurtrière de ces dix dernières années. Les deux tiers des victimes ont été recensées au Moyen-Orient, avec près d’un tué par jour au cours des trois derniers mois de l’année à Gaza. Sur les 140 travailleurs des médias tués dans 28 pays, au moins 81 l’ont été à Gaza depuis le 7 octobre dernier (106 selon le bureau des médias à Gaza, les différences dans les chiffres sont dues à des différences dans la qualification de la profession de journaliste). Il s’agit exclusivement de Palestiniens, la plupart travaillant pour plusieurs médias dont des médias étrangers. Ils ont été tués lors de frappes israéliennes indiscriminées, souvent à leur domicile, avec des membres de leur famille, selon la PEC, une organisation non gouvernementale avec statut consultatif spécial à l’ONU fondée en juin 2004 par un groupe de journalistes de plusieurs pays, basée à Genève.
Pour le président de la PEC, Blaise Lempen, contacté par Global Geneva, « 81 travailleurs des médias ont été tués jusqu’au 31 décembre 2023, selon notre rapport annuel. Avec les deux personnes tuées aujourd’hui 7 janvier 2024 à Gaza, une d’Al-Jazeera et un collaborateur de l’AFP, le bilan s’élève désormais de 83 morts ».
« Nous condamnons ces frappes indiscriminées qui ne font pas la différence entre civils et combattants du Hamas. S’il est difficile de vérifier si les journalistes ont été intentionnellement ciblés ou non, l’armée israélienne a procédé à la destruction systématique des médias palestiniens à Gaza en bombardant leurs bureaux et leurs installations », a déclaré le président de la PEC Blaise Lempen.
Il s’agit du bilan le plus élevé dans les rangs des médias lors d’un conflit en un si court laps de temps. La PEC regrette que l’accès des médias étrangers à Gaza reste impraticable en raison des conditions de sécurité, ce qui empêche une information indépendante des parties au conflit.
Retour d’une solution à deux États ou nouveau paradigme ?
Francesca Albanese. (Photo: FIFDH/Miguel Bueno)
La guerre entre Israël et le Hamas, avec son lot de morts, blessés, destructions et d’actes de terreur qu’elle implique, risque de ne pas s’arrêter de sitôt, avec des allégations de crimes de guerre commis des deux côtés. Trouver une solution politique au drame du peuple palestinien et à une solution juste et durable être Israéliens et Palestiniens passe-t-elle par un retour à la solution de deux États, comme l’avait préconisé l’Initiative de Genève, lors d’une cérémonie en décembre 2003, facilitée par l’alors Conseillère fédérale en charge du Département des Affaires étrangères de la Suisse Micheline Calmy-Rey ?
Ironie de l’Histoire, comme l’a rappelé l’ancien ambassadeur suisse François Nordmann dans une chronique parue dans le quotidien Le Temps en octobre dernier, « Le 18 décembre 2003, Ariel Sharon prit les choses en main et annonça qu’il comptait retirer les forces israéliennes de Gaza et démanteler le cas échéant les colonies israéliennes qui s’y étaient installées ». Gaza, hier et aujourd’hui.
Dans une tribune parue dans le Washington Post, le 18 novembre dernier, le président des États-Unis Joe Biden écrivait : « Le peuple palestinien mérite d’avoir son propre État et un avenir libéré du Hamas », estimant que « Gaza et la Cisjordanie devraient être réunifiées sous une même structure de gouvernance, à terme sous une autorité palestiniennes revitalisée ». Et d’ajouter : « Une solution à deux États est le seul moyen d’assurer la sécurité à long terme du peuple israélien et du peuple palestinien ».
Mais cette solution à deux État n’est-elle désormais qu’un vœu pieux, compte tenu du morcellement des Territoires palestiniens occupés où vivent plus de 710’000 colons israéliens ? Dans un entretien accordé à Global Geneva, en mai dernier, la juriste et chercheuse italienne Francesca Albanese, affiliée à l’Institute for the Study of International Migration de l’Université de Georgetown, qui occupe depuis mai 2022 et jusqu’en 2028 le poste de Rapporteuse spéciale de l’ONU sur la situation des droits de l’Homme dans les Territoires palestiniens occupés depuis 1967, répondant à la question s’il est tabou d’évoquer l’impunité d’Israël, avait déclaré : « Je ne pense pas que cela soit un tabou, mais ce n’est pas un argument qui trouve beaucoup de soutien parmi les dirigeants politiques. Le seul argument que j’entends réciter comme un mantra est : « Deux États pour deux peuples » et qu’il faut négocier ».
« Mais comment négocier ? Il n’y a pas deux États en conflit. Il y a un État qui occupe et empêche l’autre de jouir de sa souveraineté. C’est pour cela que je demande un changement de paradigme impliquant un changement de langage, de critères d’analyse et la prise de mesures concrètes conformes au Droit international », avait conclu Francesca Albanese qui sera à Genève en mars pour présenter son nouveau rapport à l’ONU.
Luisa Ballin est une journaliste italo-suisse accréditée à l’ONU, correspondante du magazine Global Geneva/Italo-Swiss journalist Luisa Ballin is a contributing editor of Global Geneva magazine.
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