Salman Bal: New CAGI Director Bridging Cultures in Geneva
Explore the journey of Salman Bal, the new director of CAGI, and learn how he's committed to supporting newcomers in Geneva while fostering cultural integration.
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Explore the journey of Salman Bal, the new director of CAGI, and learn how he's committed to supporting newcomers in Geneva while fostering cultural integration.
L’ambassadeur suisse Salman Bal, nouveau Directeur du Centre d’Accueil Genève internationale (CAGI) depuis le mois de mai, dévoile à Global Geneva les défis qu’il compte relever. Association à but non lucratif, fondée en 1996 par la Confédération suisse et la République et canton de Genève, le CAGI aide les nouveaux arrivants actifs dans le cadre de la Genève internationale à s’installer et s’intégrer dans la région lémanique. Ses prestations gratuites proposent un réseau et service d’accueil, un service logement et information, l’organisation d’événements, un service de soutien aux ONG et un service d’accueil des délégués.
« Notre tâche principale est d’aider les employés et employées de la Genève internationale et leurs familles à s’adapter à un nouveau lieu, pour être performants dans leur nouveau travail, qui, pour beaucoup de diplomates est souvent, par exemple, de couvrir une vingtaine d’organisations internationales qu’ils connaissent peu. Ces personnes doivent œuvrer avec un nouveau chef, travailler dans un écosystème genevois qu’elles connaissent peu et en même temps trouver un logement. Sans oublier, si elles ont une famille, de chercher une école pour les enfants. Le CAGI s’efforce de les aider à s’installer au mieux », explique le directeur d’une instance qui bénéficie également du soutien d’institutions publiques et privées
Un des services essentiels du CAGI est d’aider les nouveaux arrivants à trouver un logis grâce à la bourse du logement en ligne qui leur permet de recevoir une liste d’appartements ou de maisons selon les critères qu’ils souhaitent, ce qui leur évite de courir les régies ou de parcourir des dizaines de pages sur internet. « Deux de nos experts peuvent également relire les contrats de bail à loyer des personnes qui ne connaissent pas les lois suisses ou qui ne comprennent pas bien le français. Nous donnons aussi des conseils quant aux documents nécessaires pour trouver un logement et, lorsque la personne quitte Genève, nous la rendons attentive à ce qu’il faut faire au moment de la remise du logement. Les chefs d’agences et les ambassadeurs, ainsi que leurs adjoints, peuvent, s’ils le souhaitent, bénéficier d’un service VIP qui les accompagne pour la visite de chaque logement », précise Salman Bal. Le service du logement assiste aussi des missions permanentes dans leurs recherches de bureaux.
Le CAGI vient ainsi en aide à un millier de personnes par an. Il coopère, entre autres, avec la Fondation Terra et Casa qui propose en priorité des logements à des personnes en lien avec la Genève internationale. « Des particuliers peuvent aussi nous contacter s’ils ont des appartements ou des maisons à louer ou s’ils louent des chambres destinées aux stagiaires des organisations internationales ».
Un réseau d’accueil est également proposé aux personnes qui arrivent à Genève munies d’une carte de légitimation, grâce à la trentaine de bénévoles qui appellent chaque nouvel arrivant à Genève pour lui souhaiter la bienvenue. « Plusieurs personnes m’ont dit s’être souvenues de ce premier appel car elles n’avaient pas eu cela ailleurs. Nous leur faisons également découvrir des lieux cachés ou insolites du canton de Genève et du canton de Vaud. Lorsque je suis arrivé comme étudiant à Genève, je ne connaissais que le triangle Plainpalais-Eaux-Vives-Pâquis. C’est sans doute le cas pour d’autres personnes. Nous organisons des excursions, comme la visite du château de Jussy avec dégustation de produits locaux. Au mois de juin, nous étions dans le jardin d’une villa au bord du lac pour assister au départ du Bol d’Or », déclare Salman Bal.
Le nouveau directeur du CAGI symbolise l’attrait que la Genève internationale suscite. Salman Bal n’est pas né Suisse, il l’est devenu avec une ardente patience, en réussissant un parcours hors du commun. Son désir de suissitude est né lorsqu’il était adolescent. Sa trajectoire l’a mené d’un village de montagne kurde en Turquie à la diplomatie de la Confédération helvétique puis au cabinet du Directeur général de l’Office des Nations Unies à Genève Michael Møller, avant de diriger l’entité qui résume bien sa passion pour Genève.
J’ai rencontré Salman Bal au siège de la Mission de la Suisse auprès de l’ONU, en 2014, lorsqu’il était diplomate. Une année plus tard, il devenait fonctionnaire international, en tant que conseiller pour les questions politiques du Directeur général de l’ONUG, le Danois Michael Møller. D’une voix posée, dans un français impeccable et avec une légère cadence suisse alémanique, Salman Bal me dévoilait son chemin de vie. « Je suis né entre octobre et décembre 1971 à Çiflikkaleköyü, un village de montagne kurde en Turquie sans électricité et sans eau courante. Mon père est arrivé en Suisse dans la région de Bâle. Quelques années plus tard, ma mère, mon frère et ma sœur l’ont rejoint. Je suis resté au village avec ma grand-mère. Mon grand-père était en Allemagne et ma grand-mère l’a ensuite rejoint. Un oncle s’est alors occupé de moi. A 9 ans, j’ai quitté mon village et je suis arrivé à Bâle ».
Dans la cité rhénane, le jeune garçon suit une scolarité qu’il terminera avec une maturité en poche. Le week-end et les vacances, il ne les consacre pas au repos mais aux petits boulots qu’il enchaîne pour gagner un peu d’argent. « Je tirais, par exemple, les chariots qui vendent du café, de la bière et de l’eau dans les trains. C’est ainsi que je suis arrivé à Genève. Ce devait être en 1990. Dans ce travail, nous avions des pauses de quelques heures. J’en ai profité pour découvrir Genève ». Une ville qu’il retrouvera tout au long de son cheminement professionnel.
« À Bâle, nous avions eu un échange avec une classe genevoise du Collège de Candolle » se souvient-il. À 16 ans, l’âge où les jeunes cherchent leur voie, Salman Bal a un rêve précis : « Je voulais devenir diplomate suisse ». Rêveur pragmatique, le jeune homme se donnera les moyens de son ambition. « J’ai entrepris des études en relations internationales et préparé la licence à l’Université de Genève puis à l’Institut des hautes études internationales », devenu l’IHEID The Graduate Institute.
Salman Bal s’envole ensuite pour l’Angleterre. Il entre à l’University of Essex à Colchester où il obtiendra un Master en droits de l’homme. Il reviendra périodiquement dans la Cité de Calvin. Au printemps de l’an 2000, après avoir travaillé pour l’OSCE au Kosovo, il entre au Palais Wilson, siège du Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme de l’ONU. « L’année suivante, j’ai passé le concours diplomatique suisse. J’ai quitté Genève en mai 2001 et j’y suis revenu en 2011 ».
Suisse, Kurde, Turc. Si Salman Bal a pleinement conscience de ses appartenances identitaires, les gens qu’il côtoie peinent à définir son identité, d’autant plus qu’il s’exprime dans plusieurs langues : le kurde, le turc, l’allemand, le schwitzerdütsch, le français, l’anglais, le norvégien, langue de son épouse, et l’espagnol. Polyglotte et fin connaisseur des arcanes onusiennes, Salman Bal a exaucé son rêve de devenir diplomate et qui plus est à Genève, phare de cette Suisse multiculturelle et multilingue qu’il représente et qu’il contribue à faire connaître aux nouveaux arrivants.
Les langues, atout que l’ambassadeur Bal sait d’autant mieux mettre en lumière puisque le CAGI propose également une Bourse d’Échanges Linguistiques (BEL) qui s’adresse à tous, Internationaux et résidants locaux, gratuitement. La bourse est basée sur le principe de l’échange, complémentaire et non alternative aux cours de langues donnés par les écoles. « Ce réseau compte 1’300 personnes et 65 langues. De nombreux Genevois et Genevoises s’y intéressent. La prochaine rencontre aura lieu à l’Ecole Club Migros car nous souhaitons coopérer avec les acteurs locaux, comme l’IFAGE, pour rapprocher la Genève locale et la Genève internationale ».
Réaliste et visionnaire, le nouveau directeur du CAGI entend mettre davantage l’accent sur la communication et les événements conviviaux, comme les Mix & Mash. « Je souhaite notamment accueillir, durant la Geneva Peace Week, l’exposition intitulée Bouc émissaire, accrochée auparavant au Landesmuseum de Zurich. Nous sommes également en contact avec le Grand Théâtre de Genève pour organiser des événements conjoints. Je souhaite rassembler les deux mondes que sont la culture et la politique parce qu’ils peuvent enrichir mutuellement leurs débats. J’ai été frappé de découvrir que le programme de l’opéra pour la nouvelle saison a mis à l’affiche au moins deux thèmes qui touchent des sujets liés à la Genève internationale ».
Le Kiosque culturel du CAGI, situé à la porte VI du Palais des Nations, encourage par ailleurs les fonctionnaires internationaux et les diplomates à suivre les événements culturels proposés à Genève, à des prix préférentiels. Et un Delegates Information Desk est installé lors des grandes conférences, devant les salles de réunions, avec des informations sur ce que les délégués peuvent faire à Genève et dans les environs.
L’ambition de l’ambassadeur Bal au niveau de la communication est double : mieux mettre en exergue les services qu’offre le CAGI aux fonctionnaires et diplomates internationaux qui arrivent à Genève, mais également en amont, avant leur arrivée dans la Cité de Calvin. « Nous aimerions en outre augmenter le service aux organisations non gouvernementales pour mieux répondre aux questions et demandes de nombreuses ONG qui s’installent à Genève. Nous réfléchissons par ailleurs à la possibilité de mettre en place une structure pour venir en aide aux épouses et époux des diplomates en poste à Genève pour les orienter à trouver une activité économique ou académique. Car les conjoints, qui ont souvent dû quitter leur profession, se sentent parfois un peu perdus à Genève ». M. Bal souligne aussi la demande, qui continue à augmenter, adressée au service d’accueil des délégués qui a aidé à financer plus que 7’300 nuitées des délégués des ONGs et des PMA en 2018.
Le directeur du CAGI souhaite surtout faire une large place aux jeunes. « Je veux rapprocher davantage de jeunes Genevois et des jeunes actifs au sein des organisations internationales. Au mois de septembre, j’organiserai une réunion avec les jeunes de notre réseau de bénévoles et des représentants de Young UN. Et je désire également convaincre plus d’organisations qui ne sont pas du sérail du secrétariat onusien à rejoindre les membres sympathisants du CAGI, comme l’ont fait l’OMPI et l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) ».
Si l’attitude proactive de l’ambassadeur Bal porte déjà ses fruits, comment compte-t-il s’y prendre pour diminuer la méfiance des habitants de la Genève locale envers les diplomates et fonctionnaires internationaux et pour ce qui est des privilèges dont ils bénéficient ? « Beaucoup a été fait, mais il reste beaucoup à faire », reconnait-il.
Les journées portes ouvertes au Palais des Nations, au CERN, à l’OMC et au siège d’autres organisations internationales ont contribué à rapprocher les « Locaux » des « Internationaux », tout comme les soirées Mix & Mash. Le Directeur général de l’Office des Nations Unies à Genève Michael Møller, qui a quitté son poste en juin, a aussi été très actif. Ce parfait francophone a tissé des liens avec des citoyens issus de tous les milieux sociaux : écoliers, étudiants, réfugiés, journalistes, autorités genevoises et fédérales et autres. Salman Bal, qui a été son conseiller politique, peut en témoigner. « Je tiens à souligner que le dernier message du Conseil national concernant la Genève internationale a été largement adopté. Sur les 200 conseiller nationaux, 185 ont dit oui et deux ont dit non. Nous voyons que les efforts des dernières années ont eu un impact sur l’intérêt des Suisses et notamment des Suisses alémaniques envers la Genève internationale ».
Qu’en est-il de la méfiance des Locaux par rapport aux Internationaux ? « J’ai l’impression que cette image relative aux privilèges et immunités dont jouissent les diplomates et fonctionnaires internationaux est en partie due à une mauvaise communication. Les membres de la Genève internationale ne gagnent pas tous des salaires mirobolants et il est faux d’affirmer que les fonctionnaires internationaux ne paient pas d’impôts. Ils paient un impôt au sein de l’organisation dans laquelle ils travaillent et la plupart d’entre eux n’ont pas de plaques diplomatiques. Je reconnais qu’un effort de communication doit être fait, notamment envers les personnes qui ont des idées sur un monde qu’elles ne connaissent pas bien. Pour que les deux mondes se rencontrent et se connaissent davantage, par exemple par le biais de projets culturels ».
Le souhait de l’ambassadeur Bal ? « Faire en sorte que lorsqu’une personne a été en poste dans notre ville, elle devienne à son tour ambassadeur ou ambassadrice de la Genève internationale », conclut-il.
Luisa Ballin est une journaliste Italo-suisse qui collabore régulièrement avec le magazine Global Geneva.
Swiss journalist Luisa Ballin is a contributing editor of Global Geneva magazine.