EDITION FRANCAISE: L’ONU ne cesse d’alerter dirigeants politiques et opinion publique sur le sort réservé aux enfants sous différentes latitudes. Lors du début des travaux de sa session, le 13 janvier à Genève, la Président du Comité des droits de l’enfant a exprimé son inquiétude face aux conflits au Moyen-Orient et en Afrique, soulignant les pertes humaines importantes, notamment parmi les enfants à Gaza, et les violences sexuelles au Soudan et en République démocratique du Congo (RDC).
Selon Ann Marie Skelton, le monde a été témoin au cours des derniers mois d’une augmentation continue de la violence à l’encontre des enfants qui ont le plus souffert des effets dévastateurs de la guerre.
Violences sexuelles
Au Soudan et en RDC, les violences sexuelles contre les enfants en temps de guerre sont très répandues. « Il est important que la communauté internationale redouble d’efforts pour s’attaquer à ce problème », a-t-elle déclaré. Au Moyen-Orient, le conflit s’est aggravé de manière alarmante. De récents chiffres officiels font état de 44.000 morts palestiniens à Gaza, les enfants constituant une part importante des victimes.
Plus largement, dans le monde, des enfants sont victimes chaque jour de meurtres, de mutilations, d’enrôlement dans les forces armées, d’attaques contre des écoles ou des hôpitaux, de viols ou de violences sexuelles, d’enlèvements et de refus d’accès à l’aide humanitaire. Leur santé et leur accès à l’éducation sont gravement affectés.

Les enfants dans les zones de conflits
UN Photos
Une lueur d'espoire
Pour l’ONU, il est impératif que les gouvernements honorent leurs engagements au titre de la Convention relative aux droits de l’enfant. Une lueur d’espoir est apparue à Bogota, où la Colombie a accueilli une conférence sur l’élimination de la violence à l’encontre des enfants, réunissant des représentants de plus de 130 gouvernements, ainsi que des organisations de la société civile. Quelques résultats ont émergé : sept pays se sont engagés à adopter une législation interdisant les châtiments corporels dans tous les contextes, ce qui contribuerait à protéger environ 145 millions d’enfants, et près de 50 pays se sont engagés à lancer des initiatives en milieu scolaire pour prévenir la violence à l’encontre des plus jeunes.
Un enfant sur cinq en Ukraine a perdu un parent ou un proche
Effroi, angoisse. Alors que la nouvelle administration des États-Unis d’Amérique a suspendu l’aide militaire à l’Ukraine, approuvée sous la présidence de Joe Biden, et dont dépend en grande partie la résistance de l’Ukraine dans la guerre face à la Russie, et qu’un juge états-unien a bloqué le gel des fonds d'aide humanitaire et au développement ordonné par le Président Donald Trump pour 90 jours, décision judiciaire qui empêche l'administration de suspendre ou d'entraver le versement des aides internationales en cours au 19 janvier 2025, les résultats d’une enquête qui avait été publiée auparavant par l’UNICEF concernant les enfants en Ukraine étaient alarmants.
Un enfant sur cinq en Ukraine a déclaré avoir perdu un parent ou un proche depuis l’escalade de la guerre il y a trois ans. « Depuis trop longtemps, la mort et la destruction font partie intégrante du quotidien des enfants en Ukraine », déplore Catherine Russell, directrice générale de l’UNICEF. « Une telle violence engendre de la peur et des souffrances immenses et perturbe chaque aspect de leur vie ».

Les enfants dans les zones de conflits
UN Photos
De lourdes conséquences sur le développement social et scolaire
En 2024, le nombre de jeunes victimes a augmenté de plus de 50 % par rapport à 2023. Plus de 2 520 enfants ont été tués ou blessés depuis février 2022. Ce chiffre se fonde uniquement sur les victimes confirmées par l’ONU.
L’endommagement et la destruction de plus de 1 600 établissements d’enseignement et de près de 790 établissements de santé ont par ailleurs été confirmés au cours des trois dernières années. De lourdes conséquences sur le développement social et scolaire des enfants et une prévalence importante des troubles en santé mentale a été constatée.
Les enfants actuellement âgés de 3 ans en Ukraine n’ont connu que la guerre. Les parents disent se sentir épuisés physiquement et émotionnellement, ce qui a des répercussions sur leur vie de famille. Pour ne rien arranger, la guerre a également perturbé les services essentiels dont dépendent les jeunes enfants et leurs parents, estime l’UNICEF.

Les enfants haïtiens expulsés sont vulnérables à la violence
UN Photos
Haïti, l’enfance meurtrie
Haïti n’est pas en reste. En février, l’UNICEF a affirmé que les chances des enfants en Haïti d’avoir un avenir meilleur et de recevoir une éducation décente sont réduites à néant. Des mineurs sont recrutés par dizaines par des gangs violents et armés qui ont détruit 47 écoles dans la capitale haïtienne Port-au-Prince, s'ajoutant aux 284 écoles détruites en 2024, a précisé la Représentante de l’UNICEF en Haïti. « Les attaques incessantes contre l'éducation s’accélèrent, laissant des centaines de milliers d'enfants sans lieu d'apprentissage ».
Pour Geetanjali Narayan, « un enfant qui n'est pas scolarisé est un enfant en danger ». Elle ajoute que « des vidéos montrent des cris perçants d'enfants allongés sur le sol, immobiles de peur », sont un « rappel glaçant que ces attaques font des dégâts bien au-delà des murs de la salle de classe ».
Augmentatiion des violences sexuelles
Le Fonds des Nations Unies pour l’enfance a signalé l’augmentation de 1000% des violences sexuelles à l’encontre des enfants entre 2023 et 2024 dans le pays. Les mineurs représentent également la moitié du million de personnes déplacées par les violences en Haïti et continuent à payer le plus lourd tribut de la crise. L’ONU estime que près de la moitié des membres des groupes armés sont des enfants. Certains n'ont que huit ans. Le recrutement des plus jeunes dans les groupes armés avait augmenté de 70 % au cours de l'année écoulée.
Chaque année, l’UNICEF évalue les risques auxquels les enfants sont susceptibles d’être confrontés et suggère des moyens de réduire les dommages potentiels. Le dernier rapport intitulé Prospects for Children 2025 : Building Resilient Systems for Children’s Futures (Perspectives pour les enfants 2025 : Construire des systèmes résilients pour l’avenir des enfants), appelle à renforcer les systèmes nationaux conçus pour atténuer les impacts des crises sur les enfants et garantir qu’ils aient accès au soutien dont ils ont besoin. L’augmentation du nombre de conflits armés continuera de présenter un défi majeur pour la protection des enfants en 2025.
Menace de famine et de maladie.
Les attaques contre les infrastructures civiles telles que les écoles et les hôpitaux sont de plus en plus fréquentes. L’effondrement de décennies d’efforts pour protéger les civils a eu de lourdes conséquences sur les enfants. En plus des risques pour leur vie, ils sont confrontés à des déplacements et à la menace de la famine et de la maladie. Leur bien-être psychologique est également menacé.

Les enfants dans les zones de conflits
Photo: UN
Selon l’ONU, les gouvernements des pays en développement ont de plus en plus de mal à financer les investissements essentiels pour les enfants, en raison de la lenteur de la croissance économique, la faiblesse des recettes fiscales et l’insuffisance de l’aide au développement. Le fardeau croissant de la dette souveraine contribue également à cette tendance. Près de 400 millions d’enfants vivent dans des pays surendettés et, sans réformes majeures, le montant de la dette est voué à augmenter. Le coût du remboursement de cette dette prive les investissements de fonds essentiels qui pourraient être alloués au bien-être des enfants.
En 2025, le monde sera confronté à des décisions cruciales concernant les réformes des instituions, politiques publiques, règles et pratiques qui régissent le système financier mondial, prévient l’ONU.

Au Yémen, plus de 11.000 enfants tués ou blessés depuis 2015, selon l'UNICEF
UN Photo
La tragédie oubliée des enfants au Yémen
Neuf ans après le début du conflit au Yémen, près de 10 millions d’enfants ont toujours un besoin urgent d’aide humanitaire. Si la diminution du conflit en cours depuis avril 2022 a conduit à une baisse du nombre de victimes civiles et à un apaisement de la détresse au sein des communautés, la situation reste fragile en l’absence d’un règlement politique durable – une situation particulièrement critique à un moment où plus de la moitié de la population – 18,2 millions de personnes, dont 9,8 millions d’enfants – a toujours besoin d’une aide vitale.
Cette fragilité est due à la malnutrition dans le pays, où plus de 2,7 millions d’enfants souffrent de malnutrition aiguë et 49 % des enfants de moins de cinq ans souffrent de retard de croissance ou de malnutrition chronique. La situation critique entrave le développement des enfants, causant des dommages irréversibles à leur croissance physique et cognitive à long terme.

Plus de 2,7 millions d’enfants souffrent de malnutrition aiguë
Photo UN
« La conjonction dévastatrice d’années de conflit prolongé, d’une économie en ruine et d’un système de soutien social défaillant a eu un impact profond sur la vie des enfants les plus vulnérables du Yémen », a déclaré la Directrice générale de l’UNICEF, Catherine Russell.
Une menace pour les les générations à venir
« Beaucoup trop d’enfants continuent d’être privés des besoins fondamentaux, notamment une nutrition adéquate, ce qui pourrait menacer les générations à venir si une action urgente n’est pas entreprise pour fournir aux enfants les mesures préventives et les traitements dont ils ont si désespérément besoin ».
Bien que des conditions de cessez-le-feu soient en place, des affrontements sporadiques et des échanges de tirs persistent dans de nombreuses régions du pays, exposant ainsi les enfants aux dangers des mines terrestres et des restes explosifs de guerre. Depuis le début du conflit en 2015, plus de 11 500 enfants ont été tués ou blessés, dont 3 900 enfants tués et 7 600 mutilés.

En un mois, la malnutrition aiguë a doublé dans le nord de la bande de Gaza - UNICEF
Photo UN
La guerre menée par le gouvernement israélien dans l’enclave palestinienne de Gaza au cours des 15 derniers mois a accéléré « l’escalade régionale » du conflit yéménite, au détriment du processus politique et de la situation humanitaire dans le pays, selon un haut responsable des Nations Unies.
« J’ai passé une grande partie de l’année dernière à essayer de protéger le Yémen de l’escalade régionale », a ainsi rappelé Hans Grundberg, lors d’une réunion du Conseil de sécurité de l’ONU sur la situation dans le pays.
Toutefois, la guerre menée depuis le 7 octobre 2023 par Israël à Gaza a envenimé la crise. En représailles, les Houthis - un groupe également connu sous le nom d’Ansar Allah - ont multiplié les attaques à l’encontre d’Israël, ainsi que les assauts dans la mer Rouge, provoquant des ripostes coordonnées de la part des États-Unis, du Royaume-Uni et d’Israël contre le Yémen.
Selon Hans Grundberg, l’effet d'entraînement des autres crises de la région sur le pays est réciproque. « La nécessité de résoudre la crise au Yémen devient de plus en plus urgente, car la stabilité régionale nécessite, en partie, de parvenir à la paix au Yémen », a-t-il expliqué.
Si l’Envoyé spécial de l’ONU espère que les développements récents concernant l’accord de cessez-le-feu à Gaza et la libération des otages israéliens puissent se solder par une désescalade au Yémen, il constate cependant une intensification du conflit dans le pays, où le processus de dialogue national s’effrite.
Une intensification des combats aurait aussi des conséquences humanitaires dévastatrices pour le peuple yéménite, avait renchérit Joyce Msuya, la Coordonnatrice adjointe des secours d’urgence de l’ONU. « Le Yémen dépend des importations pour plus de deux tiers de son alimentation et à 90% pour ses médicaments ».
Aux dires de la Directrice générale de l’UNICEF, Catherine Russell, « la conjonction dévastatrice d’années de conflit prolongé, d’une économie en ruine et d’un système de soutien social défaillant a eu un impact profond sur la vie des enfants du Yémen. Les plus vulnérables continuent d’être privés des besoins fondamentaux, notamment une nutrition adéquate, ce qui pourrait menacer les générations à venir si une action urgente n’est pas entreprise pour fournir aux enfants les mesures préventives et les traitements dont ils ont si désespérément besoin ».
La jeunesse volée des enfants de Gaza : « une génération traumatisée »
« Des enfants ont été tués et affamés, à moins qu’ils n’aient péri dans le froid », a expliqué Tom Fletcher, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence au Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), lors d’une réunion du Conseil de sécurité de l’ONU. Et de résumer : « Une génération entière est traumatisée ».
Ses mots étaient explicites à propos de l’enclave de Gaza. « Ils ont été mutilés, séparés de leur famille ou sont devenus orphelins... Plus de 17.000 enfants sont livrés à eux-mêmes. Ceux qui n’ont pas trouvé la mort se retrouvent dépourvus d’accès à l’éducation et souffrent de maladies chroniques sans pouvoir bénéficier de soins médicaux. Beaucoup d’entre eux ont été victimes de violences sexuelles. Quant aux filles, elles ont enduré l’indignation supplémentaire de ne pas avoir accès à des soins menstruels ».
Un million d’enfants ont besoin d’un soutien psychosocial
Aux vues de récents développements inquiétants, Tom Fletcher a appelé le Conseil de sécurité à veiller à ce que le cessez-le-feu soit maintenu à Gaza et à ce que le droit international soit respecté dans tout le territoire palestinien, y compris en Cisjordanie.
Un million d’enfants ont besoin d’un soutien psychosocial pour lutter contre la dépression, l’anxiété et les pensées suicidaires, d’après les estimations du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF).
Tom Fletcher n’oublie pas non plus les otages israéliens restant aux mains du Hamas et autres groupes à Gaza. « Tous les otages doivent être libérés ». Et d’ajouter que « les Palestiniens détenus arbitrairement doivent être libérés ». Il rappelle que 4,07 milliards de dollars seront nécessaires en 2025 pour répondre aux besoins de trois millions de personnes à Gaza et en Cisjordanie.
L’UNICEF a aussi mentionné le sort des enfants israéliens. Les attaques sanglantes du 7 octobre 2023 perpétrées par le Hamas et autres groupes palestiniens en Israël ont blessé 7 500 personnes et au moins 1 200 personnes, dont 37 enfants, ont été tuées. Au 25 février 2025, il semble que 63 personnes étaient encore retenues en otage. « Je suis profondément attristée par la confirmation de la mort d’Ariel et de Kfir Bibas dans la bande de Gaza. J’appelle à un retour urgent de leur mère et de tous les otages détenus à Gaza », avait notamment déclaré Catherine Russell, Directrice générale de l’UNICEF.
Les funérailles d’Ariel et Kfir Bibas, âgés de 4 ans et huit mois et demi au moment de leur enlèvement, avaient suscité une profonde émotion en Israël. Le corps de leur mère Shiri Bibas, tuée pendant sa captivité avec ses deux fils, avait été restitué le 21 février par le Hamas aux autorités israéliennes.